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Archive for the ‘Playlists’ Category

C’est rigolo c’est rigolo tout le monde fait des listes alors moi aussi.

L’année 2012 a été une année de plus où on n’a fait que bosser sans gagner plus d’argent — voire ! sans gagner d’argent du tout. Alors comme on est docile et fainéant en même temps, on écoute de la musique en élaborant une métaphysique du froid à partir du frigo vide. Bientôt les premières conclusions.

Dans ma liste il y a (sans ordre de préférence) :

nicolas-repac-black-box

Nicolas Repac Black Box, avec des Noirs et des gens basanés qui chantent dans des langues qu’on comprend pas mais que c’est vachement beau, et que Nicolas Repac (qui est blanc) a repris tout ça et a rajouté des sons bizarres autour, derrière, par-dessus mais pas trop devant (enfin parfois si). L’autre jour j’ai entendu dire que quelqu’un avait dit que les chanteuses noires avaient une voix particulière à cause de leur palais, qui est paraît-il fait différemment de celui des Blanches. Moi je dis : chapeau ! Je veux bien aussi l’explication de pourquoi certaines musiques sont meilleures que d’autres, comme ça j’aurai plus besoin d’écrire de critiques, et je pourrai partir en vacances aux Bahamas. Bon sinon Black Box est un Élu Citizen Jazz (pour ceusses qui voudraient lire un vrai truc).

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Ways Out, le quartet de Claude Tchamitchian avec Régis Huby, Rémi Charmasson et Christophe Marguet. Arménie + électrique (alors que d’habitude il fait plutôt de l’acoustique) + rock digéré menu menu = plat chaud tout nouveau, avec accompagnement de petites larmichettes mais pas trop. Nous sommes également en présence d’un Élu (de mon cœur) Citizen Jazz, cette fois-ci rédigé par quelqu’un d’autre que moi, avec une approche différente. Un peu d’air frais quoi. En gros un violon électrique + une contrebasse jouée à l’archet + une guitare électrique + une batterie très rythmique = un fondu sonore qui souffle tout sur son passage, avec des mélodies orientalisantes et un peu tristes. Mais qu’est-ce que vous voulez, on se refait pas.

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Alphabet de Sylvain Rifflet, avec Joce Mienniel, Benjamin Flament et Philippe Giordani. Bon alors il n’y a rien à dire parce que tout a déjà été dit. Je considère que ce disque, et le suivant, renouvellent radicalement le langage improvisé en le mélangeant de manière inédite avec des éléments rock tels que le refrain, le jeu d’ensemble ou la rythmique, et que tout ce joyeux bordel est la musique de demain, c’est-à-dire en fait, si vous suivez bien, la musique d’aujourd’hui. Oui Madame ! J’en ai déjà parlé sur ce blog ici, et Citizen Jazz lui a également fait une déclaration amoureuse.

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Paris Short Stories de Joce Mienniel (il s’appelle Jocelyn en fait) avec Eve Risser, Philippe Giordani, Sylvain Rifflet, Aymeric Avice, Vincent Lafont et Antonin Rayon. Pareil que le précédent, à ceci près que musicalement, ça n’a rien à voir. Alors que Alphabet travaille sur la constitution d’un son collectif de groupe, celui-ci, dans le son collectif, cherche l’état de grâce poétique dans la nuance et l’infime. Les aplats électroniques ne sont plus au service du rythme mais de la sensation. J’ai tout expliqué dans la chronique et l’entretien de Joce Mienniel pour le jazz citoyen, et, oh surprise, je lui ai, à lui aussi, à eux tous, déclaré ma flamme.

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Bitter Sweets de Élise Caron et Edward Perraud, le duo chant/batterie le plus drôle, le plus excitant, le plus insolite, le plus bizarre, le plus free, le plus chantant, le plus rigolo, le plus émerveillé, le plus décalé, le plus énergique, le plus comique, le plus riche que vous ayez jamais entendu. C’est normal, on n’entend jamais de duo voix/batterie. Eh bien, c’est l’occasion ! Pour lire la vraie chronique, c’est . Je ne saurais trop vous conseiller d’aller les voir et les écouter en concert, ils sont magiques. Et eux au moins ils font une pochette avec des couleurs chaudes et des vaches. Et ça c’est cool.

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La pluie, les nuages et les 20 timides degrés parisiens commencent sérieusement à taper sur le système en cette fin de mois de juin. Les gens font encore plus la gueule que d’habitude dans le métro, si c’est possible. Les rues sont pâles et désertes. La ville froide et silencieuse. Bientôt il ne nous restera plus qu’à nous manger les uns les autres pour survivre. Pour rester dans l’ambiance, je propose d’écouter la playlist la plus triste, la plus déprimante et la plus sombre possible.

Évidemment, la première tentation pour une telle playlist, c’est d’aller chercher son terreau chez ECM. Attention, pas chez le ECM de Louis Sclavis, qui vient de sortir un sans aucun doute merveilleux Atlas trio (vidéo par ici) et qui sera d’ailleurs au Théâtre Paris Villette du 31 août au 2 septembre dans un spectacle musical et poétique, mais chez le ECM pur et dur, le ECM de Jan Garbarek et Marilyn Mazur (entre autres), par exemple Twelve Moons. Ou le ECM d’Anouar Brahem, au hasard : Conte de l’incroyable amour, avec Barbaras Erköse (cl), Kudsi Erguner (nai) et Lassad Hosni (bendir, darbouka). Ce disque arrachera aux plus coriaces d’entre vous des larmes de nostalgie, d’amour perdu et tout le tintouin. Il suffit qu’un de vos arrières grand-pères ait perdu un mouton une fois, et paf ! De toute façon, pour pleurer, rien de tel qu’une bonne vieille clarinette orientale, ou un duduk, ou n’importe quoi où on souffle avec des tremolos. Pfff, trop facile.

Ça c’était pour la tristesse collective, celle où on s’arrache les cheveux en hurlant avant de passer au supermarché acheter des œufs. Pour la déprime, rien de tel que de retourner en Occident, là où on est seul avec soi, et basta. Alors là, j’ai un petit quelque chose de derrière les fagots qui est parfait pour qui a décidé de ne pas sortir de son lit aujourd’hui : In Bern de Loren MazzaCane Connors (improvisateur tout terrain – guitare) et Jim O’Rourke (Sonic Youth – guitare). Le combo guitare/guitare fait des merveilles en termes de teint cadavérique et d’humeur massacrante. On admirera les paysages désertiques et mortifères, ainsi que les routes qui semblent ne jamais devoir se finir. Il y a les deux faces : celle où ça gratte et ça énerve (cordes pincées, normal quoi) et celle où ça se perd et ça se liquéfie (effets, nappes, etc), comme ça, si l’une vous laisse indifférent, l’autre est là pour vous atteindre en plein cœur, et vous ne retrouverez jamais votre chemin.

Après on peut creuser le sillon et aller voir du côté du métal industriel et ses sonorités chaleureuses et chantantes, et là, que vois-je ? La B.O. de Millenium, The Girl With The Dragon Tattoo, par Trent Reznor (Nine Inch Nails) et Atticus Ross. Oh merveille des merveilles ! Qui veut se tirer une balle sans que personne n’entende ? Ça commence par une reprise d' »Immigrant Song » franchement sale, et ça continue par une succession de petites formes qui cultivent le « dark » et l’inquiétant. On pourrait se dire que la musique a été composée pour un film lui-même dark et inquiétant, et que ceci justifie cela, mais ce serait sans compter les multiples collaborations des deux hommes à travers l’histoire : Atticus Ross a produit Nine Inch Nails et participe actuellement à How To Destroy Angels, groupe dont le doux nom résonne encore aux oreilles des petits lapins roses de mon enfance. On se demande si le Prozac leur est livré à la pièce ou au kilo. Je n’ai pas vu le film et je n’ai pas envie de le voir.

Le rock regorge de dépressifs, nul besoin de creuser plus avant. Neil Young et Nick Cave à eux seuls pourraient se faire jeter d’une falaise un troupeau de buffles un peu fragile. Récemment, dans le monde de la musique improvisée, Sophia Domancich a frappé fort avec Snakes and Ladders (Cristal Records) : un recueil de chansons jouées par des musiciens qui ont jalonné sa carrière et sa vie. La plupart des paroles sont des poèmes, parfois traduits en anglais, parfois laissés en français, de Jacqueline Cahen dans L’immédiat labile. Extraordinaire. D’une beauté saisissante. En concert, Sophia Domancich va et vient entre le piano et le micro, John Greaves entre le micro et un fauteuil dans le salon en fond de scène, Jef Morin fait les guitares, Raphaël Marc rajoute ses samples, Himiko Paganotti flotte au-dessus de tout ça avec une grâce époustouflante et Simon Goubert est toujours là. Plus triste, tu meurs.

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Big pop comme repère lumineux dans le firmament de la musique improvisée, Big jazz comme hommage à l’inventivité, au volume, à la profondeur.

Le big nouveau est arrivé : Alphabet de Sylvain Rifflet. Non content de sortir une perle chez Sans bruit il y a quelques semaines à peine avec le disque Beaux-Arts, le saxophoniste et clarinettiste Sylvain Rifflet s’attaque maintenant à l’Alphabet aux côtés de Philippe Giordani (g), Jocelyn Mienniel (flûte) et Benjamin Flament (perc). L’électronique est présente chez tous les instruments, non à la manière d’un remplissage verbeux mais pour modifier reliefs et volumes. Les compositions jouent constamment sur l’attente que l’on peut avoir de l’assemblage de tel instrument avec tel autre et en prend évidemment le contre-pied, pour créer des boucles évolutives qui rappellent quelque chose de la musique spectrale (par exemple les boucles dans Les Nègres de Lévinas) et minimale (Steve Reich) pour la forme et quelque chose d’un mélange de King Crimson avec Nine Inch Nails pour le fond. Des sortes de plateaux sonores s’enchâssent les uns dans les autres comme les vagues creusent le rivage. C’est finalement un objet totalement nouveau qui rencontre les oreilles, sophistiqué mais non hermétique, inspiré par des musiques antagonistes mais d’une très grande homogénéité. Chapeau. [Le disque est en téléchargement libre et disponible à l’achat sur la même page. On peut lire pour compléter la superbe revue fouillée de Maître Chronique ici.]

Le big parmi les bigs : E total du MégaOctet d’Andy Emler. Ça y est, il est arrivé. Le dernier disque du MégaOctet est sorti au début du mois de mai. L’orchestre est devenu star au fil d’albums qui portent invariablement la marque de leur compositeur ; le son Andy Emler y est immédiatement reconnaissable, et totalement indispensable — en témoigne l’abandon du projet Dionysos, où chaque musicien avait été mis à contribution comme compositeur, comme si le groupe ne se reconnaissait plus. C’est un MégaOctet plus « mature » qui nous revient là, « mature » mis entre guillemets parce qu’il est ironique et presque ridicule de parler de maturité au sujet d’un orchestre qui a plus de vingt ans et d’un compositeur qui n’a plus besoin de faire ses preuves depuis longtemps. Non, « mature » parce que l’ensemble paraît ici avoir été marqué de sa belle marque, avoir laissé ses empreintes sur sa propre musique, et l’avoir ainsi rendue plus profonde, si c’était possible. Les morceaux creusent davantage leurs propres ornières que sur les disques précédents, sont plus sombres, plus mélancoliques peut-être, mais sans jamais que le tout en soit plombé, bien au contraire. On retrouve la joie du partage, la discrétion du marionnettiste de l’ombre Andy Emler, et le plaisir du concept : avant c’était le rugby, maintenant c’est le Mi (E en anglais) : tous les morceaux reposent sur une fondamentale de Mi. On découvre aussi la beauté de Laurent Dehors dans une ballade, ou encore Élise Caron en invitée sur un hommage à Zawinul. C’est un nouveau coup de maître que le MégaOctet (Andy Emler piano, compositions, direction, Laurent Blondiau trompette, bugle, Laurent Dehors saxophones ténor et soprano, clarinettes, Thomas de Pourquery saxophone alto, voix, Philippe Sellam saxophone alto, François Thuillier tuba, Claude Tchamitchian contrebasse, Eric Echampard batterie, François Verly marimba, tablas, percussions) nous livre, accompagné d’une vidéo tournée par Richard Bois pendant l’enregistrement sur le label La Buissonne.

Deux disques seulement sur cette playlist, mais deux disques qui, dans des registres totalement différents, font honneur à l’imagination, la créativité, la fête… bref, Big music.

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Le jazz, c’est bien quand ça s’arrête aussi.

Le rap thing : Découverts la semaine dernière au festival Sons d’Hiver, Desdamona (Ursus Minor) et Carnage The Executioner réussissent l’exploit de faire aimer le rap à ceux à qui il a toujours donné des boutons. Leur fabuleux duo Ill Chemistry, dont le dernier disque vient de sortir chez Nato (dont on ne dira jamais assez tout le bien qu’on en pense), étonne par sa présence, sa performance et sa musicalité. Arrivés tout droit de Minneapolis, ils donnent corps à des paroles politiques ancrées dans l’expérience, et témoignent d’une volonté touchante de rencontrer le public. Leur rap n’est pas un effet de style, mais bien le meilleur moyen qu’ils aient trouvé pour incarner une urgence à dire et à partager.

Le rock thing : Vous saviez que c’étaient les Beatles qui avaient inventé le clip ? Ils avaient la flemme d’aller aux Etats-Unis pour faire une émission télé alors ils ont envoyé une vidéo à la place, où on les voit simplement interpréter leur morceau sur une scène en carton pâte, avec leurs costumes noirs et leur bouille rigolote, comme ils l’auraient fait là-bas.

PJ Harvey, « The Glorious Land », Let England Shake

Le post-rock thing (même si on sait pas bien ce que ça veut dire) : Garden Parti & Caroline, Yes, de Caroline. La contrebassiste et chanteuse Sarah Murcia est aux commandes d’un projet mégalo sur une femme imaginaire, Caroline, dont le nom est susurré, miaulé, caressé, à chaque morceau ou presque, aux côtés d’une ribambelle de star(lette)s telles que Jeanne Balibar, Rodolphe Burger ou Fantazio. Si le second disque est un peu décevant, le premier, quasiment entièrement instrumental, allie avec génie jazz et rock, grâce à des musiciens de talent : Olivier Py (ts, ss, fl), Gilles Coronado (g) et Franck Vaillant (dms, Simmons SDSV).

Le folk thing : Comme pour Nato, on ne dira jamais assez tout le bien qu’on pense du label Sans bruit, qui est fatiguant de qualité et d’enthousiasme. Mais où sont passés les crocodiles avides de profit et de musique toute prête ? Ils ont été anéantis par la guitare de Pascal Maupeu, qui reprend en solo de grands standards de country/folk américaine dans — attention — Folk Standards, un régal de virtuosité véloce mariée à ce qu’on imagine être un rêve d’enfant. Tout ce qu’on peut reprocher à ce disque, c’est de ne durer qu’une demi heure, une honte quand on a tant de choses à dire !

Le tout à voir mais qu’est-ce que c’est bien : Beaux-Arts, de Sylvain Rifflet.

Gilles Coronado  guitar
Christophe Lavergne  drums, music box
Frédéric Norel  violin
Clément Janinet  violin
Benachir Boukhatem  viola
Olivier Koundouno  cello
Sylvain Rifflet  composition, saxophone & clarinet, metallophone

Voilà, on l’attendait, il est arrivé. Le disque de jazz qui allait nous redonner le sourire et la patate en ces temps de grisaille maussade. Le disque qui allait rebooster le corps comme on redémarre un ordinateur. Le disque qu’on allait avoir envie d’écouter sous perfusion pendant des jours et des jours. Et où il est ce disque ? Chez Sans bruit évidemment !

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Petit Papa Noël,

Quand tu descendras du ciel après avoir fini ta bouteille de rhum, changé de psy et refait tes comptes de l’année — oui, c’est la merde, cherche pas — tu voudras bien s’il te plaît faire un effort et tenter de passer ton bide par le trou de ma cheminée. Non parce que là j’en ai marre, j’ai plus le temps d’aller au concert, ce qui revient à peu près au même que si on t’enlevait ta bouteille tout en la tenant soigneusement à dix centimètres de ton visage, les mains attachées derrière le dos. J’ai plus le temps d’aller au concert, parce que je travaille. Tout le temps. Et le soir maintenant je dors. Comment ils font les gens qui ont un métier ? On m’avait pas prévenue.

Je ne peux donc que supputer que Coax a du magnifiquement chanter Noël, comme à son habitude, la semaine dernière à Montreuil. J’imagine que le Bruit du [Sign] a fait un superbe concert il y a 15 jours à Achères. Je souhaite que le Surnatural Orchestra ait attiré beaucoup de monde mi-décembre à l’Ermitage. J’encourage la nouvelle formation de Sylvain Rifflet, Alphabet, à venir (re)jouer sous nos fenêtres dès qu’elle le pourra. Tout comme je ne doute pas que la péniche L’Improviste amarrée sur le canal de l’Ourcq dans le 19è, où je n’ai pas encore eu le temps de mettre un pied, a de beaux jours devant elle. Je regrette de ne pas être allée m’engoncer dans les chaises pour bébé du Sunside pour écouter Jim Black au début de l’hiver. Et soupire en pensant à l’Impérial Quartet et à Ways Out qui jouaient à la Dynamo de Banlieues Bleues le 9 de ce mois. Bref, si toutes ces formations, et bien d’autres, avaient l’amabilité de passer dans mon salon le matin entre 7 et 8, je leur en saurai gré. Merci.

En attendant, je veux bien ça :

Et ça :

Je n’ai rien à dire dessus, je n’ai jamais écouté ces disques. Simplement, j’imagine je souhaite j’encourage je soupire je regrette je ne doute pas je suppute que ce sont d’excellents disques. Avis aux aventuriers.

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Cette année, la playlist de rentrée sera turque ou ne sera pas.

Aujourd’hui sont publiés sur Citizen Jazz les deux premiers volets d’un dossier sur le jazz à Istanbul : une introduction, d’abord, à la foisonnante vie musicale turque ; un focus ensuite sur le club de jazz le plus « jazz » de la ville, le Nardis. 8 articles sont prévus en tout, à raison de deux publications par semaine. De quoi nourrir un panorama qui se veut le plus large possible sur cette incroyable ville qu’est Istanbul. Belette & Jazz en propose un échantillon, parfois agrémenté de sauce piquante, au rythme des publications.

Ze incontournable que tu peux pas test : Tarkan. On vous a dit que la Turquie, c’était un oud, une zurna et un chanteur à la voix venue du fond des âges ? On vous a trompé. La Turquie, c’est ça :

Une mauvaise pop omniprésente, qui date de préférence des années 80 (que ce soit une réalité ou une métaphore), des sonorités extrêmement kitsch sur fond de jeunes filles en pâmoison. Tarkan est homosexuel, paraît-il, mais jamais il ne l’avouera. Impossible en Turquie. Dans le clip, les rues sont beaucoup trop vides, lumineuses et propres, par ailleurs. La musique, là-bas, c’est à 8 comme à 4 heures du matin, dans les bars, les magasins, les taxis, les étalages, dans la rue, par la fenêtre… partout ! Personne n’y échappe. Et quand vous dites que vous êtes Français(e), on vous répond : « Ah ! Dany Brillant ? »

Ze jâze à la turque : le jazz, là-bas, finalement c’est comme ici, c’est chic, c’est cher, y’a des écrans dans les clubs pour ceux qui voient rien et c’est plus enfumé parce que maintenant c’est interdit. Mais l’esprit y est. Le Duc des Lombards local s’appelle le Nardis, et mine de rien, c’est une prouesse que d’avoir maintenu à flot ce club, qui ne désemplit pas, pendant près de 10 ans. Parce qu’en Turquie, la musique, ce n’est pas une propriété mais un bien collectif. Pourquoi payer pour aller voir un concert quand on peut en entendre chaque jour dans la rue ? On ne compte pas les concerts impromptus dans les bars, les restaurants, aux sonorités locales ou ultra contemporaines, peu importe. Sauf que leurs standards ressemblent plus à ça qu’à Night in Tunisia :

Alors les amoureux des thèmes de Gillespie vont écouter le pianiste Kürşad Deniz et/ou la chanteuse Sibel Köse au Nardis, un endroit où l’on peut tout de même entendre de temps en temps le groupe de la vidéo précédente, Yansımalar.

Ze rock à la turque : Plus intéressant, les mélanges trad/moderne un peu alternatifs. Et pour ça, le premier groupe qui vient aux lèvres de la Turquie entière, c’est BaBa Zula, un groupe d’ « oriental dub ». Ce sont eux qui ouvrent le film Crossing The Bridge de Fatih Akin, qui brosse un portrait complet de la musique à Istanbul, sans se cantonner à un seul genre. On y passe quelques jours en compagnie de ce groupe, qui incarne l’Istanbul d’aujourd’hui, et dont on peut voir un clip sur Youtube. On y entend aussi le merveilleux joueur de clarinette Kudsi Erguner ou encore la chanteuse kurde Aynur Doğan, autant de musiciens dont on reparle dans les semaines à venir !

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… ou la playlist de la patate.

La dingo-patate : Le Sacre du Tympan, Le Retour. Pluie de cuivres et rock festif. On se croirait dans la BO d’un film policier d’aventures romantique, quelque part entre Luciano Berio et The Divine Comedy. Bientôt un nouvel album : Soundtrax. Concert de sortie de disque le 13 mai à l’Alhambra (Paris Xè).

La patate psyché : Yom and The Wonder Rabbis, With Love. Road trip le long du Danube, sur fond de paysage post-apocalyptique, entre klezmer traditionnel et transe rock, à grands renforts de lentes montées en puissance et de grosse caisse. Les supers rabbins et leur meneur partent reconquérir le monde avec une clarinette (Yom), des claviers (Manuel Peskine), une basse électrique (Sylvain Daniel) et une batterie (Sébastien Lété sur le disque et Emiliano Turi en concert). Ça ne se prend pas au sérieux mais ça prend sérieusement les tripes. (Morceaux en écoute sur le site.) Concert de sortie de disque le 15 avril à la Maroquinerie (Paris, XXè).

La patate punk : Jean Louis. Rond, tordu, pointu, les crocs de Morse n’en finissent pas de hurler, avec trompette, guitare, contrebasse, batterie et objets. Aymeric Avice, Joachim Florent et Francesco Pastacaldi ont produit leur propre album (tranchemusic@hotmail.fr) et regonflé le sens du mot punk. Le bruit, c’est la mélodie, et vice versa. Ça s’amuse, mais ça ne se perd pas. Très construits, les morceaux empruntent à toutes les maisons – jazz, rock, pop – pour un combo qui envoie… la patate. Un titre en écoute sur youtube. En concert au Triton (Les Lilas, 93) le 9 juin 2011.

La douce patate : Le Trio Joubran, AsFar. Nés en Palestine, possédant la double nationalité palestinienne et israélienne, les trois frères du Trio Joubran jouent du oud depuis quatre générations, et sont accompagnés cette fois-ci par Yousef Hbeisch (percussions) et Dhafer Youssef (voix). Je ne saurais trop vous conseiller, pour découvrir cette patate du monde, d’aller écouter les extraits de concert avec Mahmoud Darwich : la langue arabe est sublimée par une musique venue du fond des âges.

La patate du futur : elle arrive.

La patate chaude : Magic Malik, Short Cuts. Alors que le disque commence par une jolie pop bien faite et bien agréable, on a vite l’impression, avec l’apparition de toutes sortes d’effets électroniques, d’avoir affaire à une nouvelle BO de Star Wars, version R2D2. Je suis perplexe. Le mieux, c’est encore d’aller se faire une idée par soi-même, ici.

La patate qu’a rien à voir mais qu’est-ce que c’est bien :

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Cher Père Noël, j’ai été très sage cette année, en conséquence de quoi j’aimerais trouver au pied de la cheminée :

The very new tout chaud tout beau Yebunna Seneserhat du Bruit du [sign], un dingo-groupe qui est parti en Ethiopie regarder/écouter/écrire la danse Eskesta de Melaku Belay et Zenash Tsegaye. Ça danse, ça chante, ça parle – ça nous parle. Sur scène, leurs corps rythment la musique de Nicolas Stephan (ts), Jeanne Added (v), Julien Rousseau (tr), Julien Omé (g), Théo Girard (b) et Sébastien Brun (dr). À déguster en vidéo ici ou .

Ze pas très niou mais onsenfou : Soffio di Scelsi de Bruno Chevillon, Jean-Marc Foltz et Stephan Oliva, 14 rêves inspirés par la musique du compositeur Giacinto Scelsi qui sont autant d’odes à la musique. On ne se remet pas de leur concert à la Dynamo du 19 novembre 2010 : avec une subtilité et une finesse incroyables, contrebasse, clarinette et piano esquissent les contours d’une oeuvre délicate, poétique, traversée d’images nocturnes, de coups de gong et de vents lointains. Magnifique.

Le qui-défonce-tout : Lips on Fire du Trio Journal intime. Fred Gastard (bs), Matthias Mahler (tb) et Sylvain Bardiau (tr), ou les trois souffleurs fous qui déboulent sur du Hendrix et qui, non contents de nous donner une patate d’enfer, se paient le luxe de réécrire le génie avec génie. Génial, quoi.

Le rien à voir (en fait si un peu quand même) mais qu’est-ce que c’est bien :

Merci.

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Quatrième playlist : automnale et popisante.

Le Shut Up And Dance : pas besoin de titre, celui du disque parle de lui-même.

Tout juste sorti, le dernier album de l’Orchestre National de Jazz du contrebassiste Daniel Yvinec donne la parole à John Hollenbeck : il a composé tous les morceaux pour chaque musicien de la formation, à savoir Antonin Tri-Hoang, Pierre Perchaud, Eve Risser, Rémi Dumoulin, Matthieu Metzger (déjà vu chez Sclavis), Vincent Lafont, Joce Miennel, Guillaume Poncelet, Sylvain Daniel (DPZ) et Yoann Serra. Plutôt que de jazz, l’orchestre pourrait être de pop. Son directeur artistique n’a pas spécialement tenu à imprimer de label jazzy sur sa musique, et c’est tant mieux. Après un premier disque de reprises de Robert Wyatt (en écoute ici), et deux projets sur Billie Holiday et Carmen, l’ONJ nous revient avec du pop/rock mâtiné d’improvisations cuivrées, aérien et volatile, comme les pieds des danseurs.

Le bonbon : Radio Silence du Neil Cowley Trio. Certains font grand cas de cet énième avatar d’e.s.t. Parfait pour les amateurs de bon easy listening, il lui manque néanmoins ce petit quelque chose qui en ferait un très bon album. C’est un bonbon : agréable en bouche, mais difficile à digérer quand on en prend trop.

Le rien à voir mais qu’est-ce que c’est bien :

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C’est la rentrée. Une playlist s’impose.

Le déjà acquis à sa causeLouis Sclavis, Lost on the way. Pourquoi me fatiguerais-je à vous vendre cet album, sorti en 2009, qui, non content de réunir un excellent crew : Matthieu Metzger (ss, as), Maxime Delpierre (g), Olivier Lété (b), François Merville (dr), a l’immense mérite d’être à la fois facile d’accès, parce que très mélodique, et regorgeant de nuances expérimentales-rockisantes que l’amateur éclairé aura plaisir à déceler les unes après les autres. Un bijou.

Le p’tit dernier : fans de trompette, fans de guitare, foncez ! Ceci est le dernier-né (2010) de Christian Pruvost (tp), Ivann Cruz (g, et compositeur de 5 morceaux sur 6), Charles Duytschaever (dr) et Mathieu Millet (cb, et auteur du sixième morceau), alias Arsis, sur Circum-Disc. Désordres, à la pochette artcontemporainesque, vous débroussaillera les idées, entre improvisation furieuse, poème à voix basse et saturation rock.

Le lunaire : je vous laisse le plaisir de lire ce que je n’aurais pu écrire, au sujet de la méditation cosmique superbement glacée de Jean-Marc Foltz (cl), aux côtés de Matt Turner (cello) et Bill Carrothers (p), in To the moon. Pour refroidir les chaudes journées d’été.

Le rien à voir mais qu’est-ce que c’est bien : Un jour avant Pâques, de Zoyâ Pirzâd. Elle est musulmane, il est arménien. Dans ce roman en trois parties de l’écrivaine iranienne, les temps se croisent et se chevauchent, comme les idées et les frontières. D’une plume aussi subtile que concise, Zoyâ Pirzâd dessine un Moyen-Orient obscurantiste et progressiste, sectaire et libertaire, athée et religieux. À lire !

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