Musiques, improvisations, performances et installations à Marseille les 17-18-19 et 20 octobre 2012 : première édition riche et singulière du festival marseillais les Émouvantes, à l’initiative du label de musiques improvisées Émouvance.
Alors que les préparatifs ambitieux de Marseille pour devenir la capitale culturelle européenne en 2013 arrivent à terme, les lieux de culture historiques continuent d’accueillir et de diffuser des arts peu visibles. Concert mis en lumière et en espace, performance, improvisation, musiques troublantes : à la Friche de la Belle de Mai, le programme des Émouvantes cultive, comme le label Émouvance, fondé il y a 18 ans par Claude Tchamitchian (photo Hélène Collon), l’indépendance et la pluralité à travers des propositions remarquables, toutes nées d’une idée musicale, déclinée ou non au moyen d’autres médiums, théâtraux, visuels ou corporels.
Ancienne usine de la SEITA, la Friche de la Belle de Mai a donné le nom du Service d’Exploitation Industrielle des Tabacs et Allumettes à la salle qui accueille le festival. Difficile de trouver un lieu dans la cité phocéenne, aussi le tout jeune festival était plutôt reconnaissant. On accède à la salle en suivant les flèches, comme dans les jeux de piste de l’enfance ; quelques marches et nous voilà dans la salle Seita, qui a tout du cabaret. Rouge et chaleureuse, elle est habillée par l’exposition insolite de la Nantaise Claire Salmon Legagneur, Face à face, Double face, sept installations aussi poétiques qu’un inventaire à la Prévert, du tapis à la boîte, qui explorent en lumière la matière (tissu, bois, plastique, objets de récupération) et le relief.
Politique des arts
Le 17 octobre, une discussion entre Claude Tchamitchian et Anne Montaron ouvre le festival. Productrice à Radio France de la précieuse émission À l’improviste , cette dernière réveille les esprits d’une voix ferme et musicale. Émouvance est une forme de résistance : défense des cultures orales dans leur diversité face à l’hégémonie de l’écrit, diffusion de spectacles pluridisciplinaires, qui peinent à cause de leur forme à trouver des acheteurs (théâtre ? musique ? danse ?), alors que le propos est précisément d’abattre les murs tant qu’il y en aura encore, promotion enfin d’une vision du monde qui refuse de sacrifier au rendement et au tout préparé, qui exige d’elle-même une recherche artistique et fait confiance aux spectateurs pour ouvrir les sens. Claude Tchamitchian répond aux questions d’Anne Montaron devant un public convaincu mais silencieux. Installés près de l’entrée, les Allumés du Jazz tendent l’oreille. Ils sont venus avec des disques et des livres qui rappellent la multiplicité des associations, labels, structures qui existent et résistent. Le contrebassiste joint le geste à la parole, et quelques notes improvisées autour de son dernier album solo, Another Childhood, clôturent la soirée.
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